samedi 16 novembre 2024

CLUB5A - REPORTAGE AUTO - PORTAIT DE COLLECTIONNEUR !!...LES VOITURES DE L'EST ...

- Les Voitures de l’Est 
 Son grand-père était un vieux militant communiste, son père roulait en Lada 2101, la « Jigouli », dérivée de la Fiat 124. Quand il prend le volant, il n’oublie pas sa parka, sa toque et ses bottines fourrées. Il ne lit pas la Pravda mais il a quelques notions de cyrillique pour déchiffrer les rares revues techniques disponibles et collecter les documents publicitaires généralement aussi joyeux et illustrés qu’un rapport de la Cour des Comptes.
 Lui, c’est l’amateur des voitures de l’Est, celles qu’on ne fabriquait pas pour rigoler mais pour permettre à quelques apparatchiks de se déplacer autrement qu’à pied ou dans des vieux autocars fumant comme une cheminée d’usine à Nijni Novgorod. Car la fumée, il aime ça : on vient de parler des vieux moteurs poussifs mais les voitures de l’Est, ce sont aussi des deux temps qui engloutissent autant d’huile qu’une friteuse de kébab à l’heure de midi, mais surtout la restitue très vite un peu partout pour éviter la corrosion dans la mécanique et faire briller les routes, voire même les transformer en de jolis arcs-en-ciel dès qu’il pleut… 
 C’est forcement aussi un amateur de mécaniques exotiques qui apprécie les nobles V8 refroidis par air tout autant que les petits bicylindres deux temps, surtout qu’il doit souvent mettre les mains dedans : une voiture de l’Est, c’est solide, c’est rompu à tous les climats, ça tourne toujours, mais mal ! 
D’ailleurs, peu importent les risques, il s’en remet généralement à la chance et à la providence, cette philosophie typiquement slave qui permet toujours de garder son calme face à l’adversité : quoi qu’il arrive, on verra bien et ce sera toujours moins grave que le goulag !
 Quant au confort, c’est un luxe bourgeois qui n’est pas de mise et qu’on évite au maximum ; entre les suspensions à lame directement issues d’un camion GAZ d’avant-guerre, les banquettes aussi moelleuse qu’un banc public de Léningrad et le bruit digne des huit moteurs d’un Tupolev ANT-20, on ne risque pas de s’endormir au volant. Le chauffage, lui, ne commence à agir que lorsque la température passe sous les -35°. Dernier point, quand il fait trop froid et quand ça ne veut rien savoir, il reste la dernière carte, la vodka : un peu dans le carbu, le reste cul-sec ! Na Zdrowié !
Source : Thierry DUBOIS-Portraits de Collectionneurs 7 -Dandy Driver