Pour concurrencer la Corvette, en 1955, Ford dévoila à son tour un coupé sportif à la silhouette éminemment suggestive au nom aussi évocateur d'oiseau du tonnerre (Thunderbird) rebaptisé plus simplement T-Bird. Vous n'imaginez pas l'attrait que peut susciter une Thunderbird aujourd'hui au sein de la circulation. Vous devez patiemment répondre aux nombreuses questions sur son nom, sa marque, son moteur, sa vitesse et son année de naissance.
Personne n'imagine que ce roadster aux lignes aussi suggestives est âgé de plus de 65 ans.
Sous cette livrée, à quelques détails stylistiques, la T-Bird à vécu de 1955 à 1957. Critiquée pour être une stricte deux places, elle évolua vers un modèle plus massif et plus habitable dit Square-Bird. Né en V8 4,7 l, pour riposter à sa concurrente de chez GM, le millésime 1956 que vous avez sous les yeux adopta un plus imposant V8 de 312 CU porté à 5113 cm3 délivrant 215 ch en boîte mécanique et 225 en automatique Ford O-Matic ! C'était dix fois la puissance de la 4 CV Renault dont elle coûtait presque 8 fois son prix avec 3 200 000 anciens francs.
Pour vous donner une idée de l'équivalence avec celui d'aujourd'hui, c'était 177 mois de salaire (18 000 francs net mensuel) d'un smigard !
La première T-Bird produite de 1955 à 1957 se caractérisait par ses lignes très sobres comparées à la suivante
Le kit Continental accroissait le volume du coffre assez petit vu le gabarit. Les échappements se cachent en bouts des pare-chocs.
D'origine française
On ne vous présente plus Loulou dont nous déjà évoqué sa Chevy 58 et sa Cobra replica. Un passionné qui a compté plus d'une centaine de voitures dans sa vie dont une Simca Océane fortement inspirée esthétiquement par cette Ford.
"Je l'ai achetée évidemment pour sa ligne extraordinaire et aussi pour son V8 au bruit magnifique. D'origine française vendue en 1956 par Ford France, elle était en bon état. Elle a été seulement révisée et repeinte dans une teinte différente. Elle totalise 120 000 km dans son état d'origine excepté le moteur d'essuie-glaces à dépression changés pour un électrique plus efficace.
Son hard-top en composite qui pèse un sacré poids, exige d'être deux pour le poser au début de la mauvaise saison" explique-t-il.
La T-Bird émet de lourds râles saccadés par ses larges sorties d'échappement cachées aux extrémités des massifs pare-chocs. Son V8 alimenté par un carburateur 4 corps lui permettait de frôler les 180 km/h, vitesse surréaliste en 1956, en engloutissant les 1000 mètres en 32 secondes.
Sa boîte mécanique compte 3 rapports, seulement épaulée par un overdrive dont la commande se cache sous la planche de bord. Il multiplie tous les rapports par deux, soit longs, soit courts. Si cela ne valait pas une boîte à vrais 4 rapports, l'overdrive permettait des reprises foudroyantes et une consommation en baisse car la T-Bird était du genre gourmande en engloutissant entre 15 et 20 litres aux 100.
La planche de bord est un régal pour les yeux. Remarquez le compte-tours à gauche, le levier de vitesses incliné vers le passager
Les retours latéraux du pare-brise panoramique gênaient l'accessibilité aux places avant.
Le V8 de 312 CU (5,1l) alimenté par un carburateur 4 corps annonçait de 215 à 225 ch
Radio tête chercheuse de série.
La commande de l'overdrive est cachée sous la planche de bord
Presque une sportive
Ceux qui ont tenté de courir avec ces années là, ont été déçus et sont revenus à la Jaguar. Si la T-Bird était puissante, elle souffrait d'un manque de stabilité à haute allure. Le résultat d'une direction assistée (master Guide) trop démultipliée et d'une suspension trop souple bien que durcie à essieu rigide à l'arrière à ressort à lames et d'un poids coquet de près de 1600 kilos à vide. L'essai que j'ai retrouvé reproche un freinage trop brutal car trop assisté, d'une tenue de route discutable sanctionnée par l'éclatement successif de deux pneus Tubeless pas du tout adaptés aux performances de la voiture. En revanche, sur route à vitesse ouverte, rien ne pouvait lui résister sauf une rarissime Facel Véga encore plus rapide essayée dans le magazine l'Automobile de juillet 1956.
Fausses prises d'air latérales surmontant une trappe chargée de refroidir l'habitacle
Toutes les Ford 55 US arboraient ce type de feu rouge en deux parties dont une ronde. Les Taunus reprendront le même dessin.
Loulou adore sa T-Bird autant pour sa ligne que son bruit
Simca Océane dessinée par Facel. Toute ressemblance ne serait pas une pure coïncidence.
Un bonheur de rouler avec
"Nous avons fait quelques voyages avec. C'est une voiture très agréable à conduire à condition de ne pas oublier qu'elle a soixante ans. À 130 km/h, elle tient correctement la route. Mais face à cette planche de bord au dessin extraordinaire, c'est un bonheur de rouler avec" avoue Loulou.
Remarquez que la capote est déjà intégrée sous une trappe qui la rend invisible, notez la prise d'air très suggestive de capot, admirez le dessin fabuleux de la planche de bord dont le compteur est surmonté d'un dôme transparent pour l'éclairer de jour et les retours gênants du fameux pare-brise à montant inversés.
En 1956, rouler en T-Bird provoquait le même attroupement qu'aujourd'hui en se déplaçant dans le grondement de son V8 dénotant au milieu des 4 CV, Dauphine et autres 203.
Au total 53 166 T-Bird de première génération furent fabriquées contre près de 200 000 pour la suivante produite jusqu'en 1960. La T-Bird sera fabriquée avec plus ou moins de réussite esthétique jusqu'en 2005 dont la 11eme et ultime mouture reprendra la silhouette néo-retro de la première unanimement considérée la plus réussie esthétiquement.
Source : Patrice Vergès-poa.tv/-Retro Classic Car