Partir en vacances… un phénomène assez récent.
Juin 1936, les congés payés deviennent un droit. Même s’ils profitent de leurs vacances pour se détendre, les ouvriers partent peu. La culture du voyage touche essentiellement la bourgeoisie urbaine et l’aristocratie.
Les bords de mer sont réservés aux classes aisées et de nombreux estivants modestes se contentent de simples escapades et de camping à la campagne.
En 1930, si on excepte les plus fortunés, les catégories sociales qui investissent dans une automobile le font avant tout pour des raisons professionnelles : artisans, médecins, représentants de commerce etc. Les ouvriers n’ont pas d’automobile, les employés et fonctionnaires sont 26% à en posséder une, les cadres et professions libérales 31%. (Moins de 2 millions de véhicules en France à la fin des années 30).
Les constructeurs proposent des petites voitures populaires telles que la fameuse Renault 4 CV ou encore la Panhard Dyna et la 2 CV. La reprise économique se profile : les modèles « modernes » et « sport » voient le jour afin de séduire la nouvelle classe moyenne émergente. Dès lors, 57% des départs en vacances s’effectuent en voiture. la croissance et la hausse du pouvoir d’achat permettent un accroissement spectaculaire des automobiles : les français peuvent voyager plus loin et la plage devient accessible au plus grand nombre. La distance ne fait plus peur : les voitures sont plus performantes, les pannes et crevaisons deviennent rares. Malheureusement, la modernisation du réseau et la construction d’autoroutes ne suivent pas : d’inextricables bouchons se forment sur les routes étroites qui n’évitent aucun village et pendant les jours de grands départs, de longues processions s’étirent sur la nationale 7.
Dans ce contexte, le vacancier prépare soigneusement son itinéraire, la moyenne kilométrique horaire devient une obsession et on enrage derrière le camion ou la caravane impossibles à doubler. Le long des nationales les plus fréquentées, un grand nombre de platanes sont coupés pour élargir et aménager des tronçons de chaussées à trois voies. Ces améliorations auront des résultats sur la vitesse et la fluidité du trafic mais vont surtout accroître les risques de dépassements dangereux.
Rappelons qu’à l’époque, la vitesse n’est pas limitée, les voitures construites sans sécurité passive, et surtout sans ceintures de sécurité. Le bilan des accidents est énorme : en 1966, 14 180 personnes perdent la vie sur les routes de France (3 250 en 2013). Symbole de liberté et d’une croissance qu’on croyait sans fin, l’automobile est plombée dès 1973 par la soudaine flambée des prix du carburant.
La faible consommation devient un argument de vente, les grandes berlines et les modèles « sport » s’effacent devant les monospaces pratiques et symptomatiques d’une conduite familiale paisible. Avec l’accélération des programmes de construction d’autoroutes par le biais des sociétés privées, la France est désormais pourvue d’un réseau moderne. Actuellement, les grands départs estivaux ont toujours un arrière-goût de bouchon, mais il faut dire que le nombre de voitures en France est passé de 6 240 000 (janvier 1960) à 38 138 000 (janvier 2013) !
Source : 01calvi / Texte : fondationberliet.org