Nous ne ferons pas ici le récit exhaustif du déroulé de cette course qui s’annonçait comme un événement extraordinaire dans ce début de siècle plein d’effervescence de progrès techniques et de bouillonnement des esprits. Beaucoup de choses ont été déjà écrites. Mais à la suite de l’histoire des automobiles Charles Alexandre Brouhot récemment publiée qui abandonna la compétition après l’accident de sa voiture dans cette course j’ai souhaité faire le point sur au combien l’enthousiasme a conduit au tragique.
En octobre 1902, l'Automobile Club de France décide de tenir une course automobile entre les deux capitales. Les inscriptions sont ouvertes à la mi-janvier et, rapidement, les principaux constructeurs s'inscrivent. Au total, 315 concurrents sont inscrits : prendront part au départ de la course 127 automobiles, 23 voiturettes et 47 motocyclettes. Il faut dire que les course entre capitales européennes étaient très prisées et préfigurait déjà de l’universalité de cette invention qu’était l’automobile. La première course étant Paris Berlin en 1901.
Commencée le dimanche 24 mai 1903 à 3 h 30 du matin à Versailles et initialement prévue pour s'étendre sur trois journées, les 24, 26 et 27 mai, elle est arrêtée par les autorités avant son terme, à Bordeaux, en raison du grand nombre d'accidents.
La traversée des villes est neutralisée. Les bolides doivent se frayer un passage sur des routes sans revêtement où il y a tellement de poussière que la « navigation » se fait par rapport aux arbres qui bordent et au milieu de spectateurs enthousiastes et inconscients du danger. Louis Renault atteindra 140 Km/h dans une descente avec ces conditions. Le vainqueur Fernand Gabriel sur son « torpilleur Mors », aura parcouru les 552 km à plus de 105 km/h de moyenne.
Le premier accident survient au passage à niveau de la ligne de Paris à Tours, à deux kilomètres de Bonneval. La voiture 243, conduite par Porter, prend feu et le malheureux chauffeur, tombé en dessous, meurt carbonisé.
Deuxième accident à Ablis : une automobile surprend une femme qui traverse la route et la tue sur le coup.
À quelques kilomètres de Poitiers, (le troisième accident) la machine de Marcel Renault verse dans un fossé ; lui-même est projeté à six mètres. Il est transporté à Couhé-Vérac dans un état désespéré. Il décèdera quelques heures plus tard.
Trois kilomètres après Angoulême, le coureur Touran sur Brouhot décolle d'un pont, provoquant la mort du mécanicien et de trois spectateurs : deux soldats et un enfant (le quatrième accident)
Près de Montguyon, (le cinquième accident) à la Combe-du-Loup, devant Arveyres, M. Stead, conducteur du no 18, est mortellement blessé à la suite d'une collision avec la voiture 96.
Le mécanicien de M. Stead est également blessé.
À Arveyres, la voiture no 5, (le sixième accident) pilotée par Claude Loraine-Barrow, rencontre un chien, braque et vient percuter un arbre. Des deux hommes qui la conduisent, l'un, le mécanicien, est tué, l'autre, M. Loraine-Barrow, est dans un état désespéré.
La voiture est en morceaux. Le chien a littéralement été réduit en bouillie.
Lucien Lesna, sur motocyclette Peugeot, est victime d'un accident. Sa fracture du genou mettra un terme à sa carrière de cycliste (le septième accident)
Devant cette hécatombe les autorités fort justement arrêteront la course.
Les conséquences seront vers une nouvelle organisation en circuits fermés en en augmentant les conditions de sécurité qui se poursuivent encore aujourd’hui.
On notera la 77 ème place de Madame Camille Du Gast sur une De Dietrich dont nous avons déjà retracé la vie de pilote..
Source : Paris – Madrid 1903 la course meurtrière.