samedi 19 octobre 2024

CLUB5A - VOITURE DE LÉGENDE - Aston Martin DB4 GT Zagato......un parfum de nostalgie !

Aston Martin a réédité une série de la superbe DB4 GT Zagato. De l’atelier à la piste, nous avons partagé les premiers pas de ce symbole de l’esprit Grand Tourisme du début des années 1960. Newport Pagnell, le fief historique d’Aston Martin désormais dévolu aux activités d’entretien et de restauration du département Works. Une journée comme les autres. Enfin presque. 
On pousse la porte d’un atelier aménagé dans un bâtiment en briques rouges. Et là, c’est le choc. Nous voici transportés au début des années 1960. Dix-neuf Aston Martin DB4 GT Zagato sont l’objet de tous les égards. Toute la production de cette petite série de DB4 GT allégées et habillées par le carrossier milanais est présente. Certaines sont en cours de montage et n’ont que la peau en aluminium sur le châssis tubulaire ; d’autres sortent de la cabine de peinture ; quelques-unes sont en cours de finition ou déjà prêtes à prendre la piste. Ce pour quoi elles avaient été construites.
 Elles portent des couleurs familières aux témoins des courses de l’époque: british racing green bien sûr, rouge, bleu ciel métallisé… Sauf qu’il s’agit ici d’une nouvelle série de voitures baptisée «Continuation» et produite à autant d’unités que la voiture présentée au salon de Londres 1960. Aston offrait ainsi la possibilité à ses clients les plus sportifs de rivaliser avec les Ferrari 250 Berlinetta qui dominaient les épreuves pour voitures de Grand Tourisme. L’ultime provocation du constructeur anglais passé maître dans l’art de manipuler son histoire. Après avoir ouvert la boîte de Pandore avec une réédition de vingt-cinq DB4 GT conformes au modèle de 1959 puis avec les dix-neuf Zagato, Aston Martin va produire vingt-cinq copies de la DB5 que James Bond conduisait dans Goldfinger. 


La démarche peut prêter le flanc à la critique mais le constructeur n’a nullement l’intention de duper son monde. Les dix-neuf Zagato produites entre 1960 et 1963 et numérotées, de DB4GT/0176 à DB4GT/0200, sont dûment répertoriées. Lorsque l’une d’entre elles change de mains, ce qui n’arrive pas souvent, le monde entier retient son souffle. 

Plus rare qu’une Ferrari 250 GTO, la berlinette anglaise est l’une des GT des années 1960 parmi les plus désirables. Si elle n’a pas connu le même destin sportif que ses rivales de Maranello, elle passe pour être l’un des plus beaux chefs-d’œuvre de Zagato. C’est ainsi qu’un amateur a dû débourser plus de 11 millions d’euros pour en acquérir une. 


Sa reproduction vaut la moitié. Pour ce prix-là, vous avez même droit à une paire indissociable de Zagato. La DB4 est vendue avec une DBS rhabillée par le transalpin qui célèbre ses cent ans. Alors qu’il faudra encore patienter un an avant de voir ces dernières, les DB4 commencent à être délivrées aux heureux privilégiés, dont un est domicilié à Monaco. Inutile de tirer des plans sur la comète, on n’est pas près d’en croiser une sur la route. 
Ces Zagato ne peuvent être immatriculées. À moins de circuler avec le titre d’une DB4 ou d’habiter dans une contrée permissive, elles ne pourront rouler que sur une route fermée ou sur un circuit. C’est ainsi que nous avons retrouvé l’exemplaire rouge dévolu à la famille Zagato sur le circuit école de Silverstone. À la lumière du jour, sa ligne trapue et agressive, œuvre du jeune styliste de 23 ans, Ercole Spada, prend toute sa dimension. Alors que les dix-neuf premières Zagato construites différaient par quelques détails, 
- la forme et le maillage de la calandre, le bossage du capot, les ouïes latérales, la présence de pare-chocs -, les copies sont toutes identiques au modèle standard du salon de Londres. Seules concessions à la modernité: l’habitacle accueille un arceau-cage et des sièges baquets en carbone. Pièce de choix, le moteur est bien le six-cylindres en ligne en alliage léger, double arbre à cames en tête de la DB4 développé par l’ingénieur Tadek Marek. 
Mais en l’espace de près de soixante ans, la puissance est passée de 314 à 390 chevaux, grâce à l’augmentation de la cylindrée d’un litre, à 4,7 litres. Paul Spires, le président de l’entité Works, nous explique que les blocs-moteurs ont été fabriqués après avoir scanné tous les composants de celui de 1960. Grâce aux alliages et aux techniques de conception moderne, le nouveau bloc est plus équilibré, plus rigide et il refroidit mieux. Son timbre de voix a toutefois conservé ses accents qui ont bercé mon enfance lorsque j’accompagnais Pierre-François Dutoya rejoindre, par la route, les épreuves historiques auxquelles il participait au volant de la Zagato DB4GT/0180 ex-Jean Kerguen. Assurément une autre époque. Engagée aux 24 Heures du Mans 1961 avec le numéro 1, cette Aston aux couleurs du Maroc (blanche à bandes rouge et verte) que son propriétaire partage avec «Franc», alias Jacques Dewez, était éliminée par une panne électrique dans la dernière heure, alors qu’elle roulait en neuvième position. Ce n’est donc pas sans un pincement au cœur que je m’installe aux commandes du bolide anglais après avoir suivi les instructions de Paul Spires. Une véritable voiture de course.
 Le six en ligne s’ébroue en tournant la clé de contact au centre de la planche de bord. Pas de doute: la Zagato est une véritable voiture de course. Elle vibre à l’unisson de tous ses organes et ne supporte pas les bas régimes. Au premier virage, on se rend compte que la boîte de vitesses David Brown à quatre rapports n’est pas un modèle de docilité. Si le double débrayage est indispensable pour éviter aux pignons de craquer, l’opération doit être menée au bon régime moteur. La disposition du pédalier ne favorise pas non plus la pratique du talon-pointe. À la vérité, le levier ne dédaigne pas une certaine brutalité. Rétrograder s’improvise d’autant moins que les freins non assistés requièrent un effort certain. S’ils n’ont pas le mordant d’une voiture actuelle, ils aident à placer la Zagato docilement à l’entrée du virage. Les pneus Dunlop Racing section L d’époque participent à la maniabilité. Malgré l’essieu rigide, les chevaux passent bien au sol. On ressent les bienfaits du différentiel à glissement limité. Au volant, on est à l’ouvrage. 
Les corrections sont incessantes et il faut accompagner plus que de coutume le volant en bois Nardi dont le diamètre important fait oublier que la direction n’est pas assistée. Nouvelle ligne droite. La GT se cabre sous l’effet d’une accélération vigoureuse mais linéaire. La sonorité rauque du moteur se confond avec les bruits de succion des carburateurs double corps Weber et des engrenages de la boîte. Plus que le pilotage forcément gratifiant, l’un des plaisirs de la Zagato provient de sa ligne qui mérite définitivement une avalanche de superlatifs. 
 Source : lefigaro.fr /.Auto Video